« Je vois dans la misandrie une porte de sortie. Une manière d’exister en dehors du passage clouté, une manière de dire non à chaque respiration. Détester les hommes, en tant que groupe social et souvent en tant qu’individus aussi, m’apporte beaucoup de joie – et pas seulement parce que je suis une vieille sorcière folle à chats. Si on devenait toutes misandres, on pourrait former une grande et belle sarabande. On se rendrait compte (et ce serait peut-être un peu douloureux au début) qu’on n’a vraiment pas besoin des hommes. On pourrait, je crois, libérer un pouvoir insoupçonné : celui, en planant très loin au-dessus du regard des hommes et des exigences masculines, de nous révéler à nous-mêmes. »
Auteurice.s:
Pauline Haramange
Commentaire
C'est marrant·e parce que la première fois que j'ai lue ce livre - el doit y avoir à peu près deux ans de cela - j'ai été un peu gênée par son propos. Reconnaissant la nécessité de la misandrie, j'étais tout de même gêné·e par la façon dont elle s'exprimait (si je me souviens bien, je metterais en annexe mon ancien résumé).
Aujourd'hui, et alors que je finis de relire ce livre, je suis sidérée à quelle point je suis d'accord avec ce dernier - et vis-à-vis de mon précedent avis. J'en viens à me dire que ce qu'elle dit·e n'est pas révolutionnaire et qu'el s'agit de banalités. Hair les hommes n'est pas un problème - n'a jamais été aussi dangeureux qu'hair les femmes - et n'est qu'une réaction face au patriarcat. Et comme le rappel Chloé Delaume dans sa préface, el s'agit moins d'une haine des hommes de façon individuelle - et quand bien même elle arrive, Haramange nous rappel très justement qu'on peut très bien hair sans vouloir la mort - que d'une haine " de ce qui le constitue, socialement et culturellement " (P.10). J'apprécie aussi beaucoup ce passage, que j'essaie moi-même d'interioriser dans ma vie de tout les jours, et qui parle du fameux adage : « Aie la confiance d'un homme médiocre » (P.51).
Quand j'ai repris ce livre, je me suis tout de suite dite que d'une façon ou d'une autre, ce titre était acrocheur de façon volontaire, et que quoique ce trouvait dans le livre devait être un peu plus nuancé que ça. Et c'est pas totalement faux. Car si Haramange insiste sur sa volonté de ne pas faire semblant et de réellement detester tout les hommes, elle reconnait tout de même dans une poignée d'entre-eux des alliés et que par " gente masculine ", elle « englobe dans ce terme tous les hommes cisgenre qui ont été socialisés comme tels, et qui jouissent de leur privilèges masculins sans les remettre en question - ou trop peu » (P.19). Malheureusement, c'est là aussi où le bas blesse.
Dans une note que j'ai marquée directement à cette même page et que je prédisait dans une autre note en page 17 juste avant, je remarque la tendance problématique qu'à Haramange à faire une séparation binaire et simpliste entre personnes cis et trans, comme si les hommes trans étaient des êtres purs incapables de quoique ce soit. Me basant ici sur la vidéo de Allistair que j'ai pu voir et qui évoque ce sujet délicat, je ne peux qu'être gênée par cette vision qui met sur le devant de la scène les experiences féminines et sexistes qu'on pu vivre les mecs trans (et qui sont réels, qu'on se le dise bien); mais tout en mettant de côté; tout en oubliant par là-même que nombres d'hommes trans se désidentifie de ces même experiences petit-à-petit - sociabilisation oblige - ou qui même, par identification avec le masculin ont pu avoir des comportements problématiques, même pré-transition. Bref, un mouvement homogénéisant que je ne peux que rejeter d'autant plus que je viens de lire The queer art of failure et que ce mouvement même indique d'une certaine façon que les hommes trans ne sont pas des hommes.
Et cette critique, c'est presque une peur fondée. Avant de commencer ce livre - et bien que comprenant la misandrie - je n'avais hônnetement qu'une peur : que cela tourne en transphobie et masculinophobie. J'ai malheureusement trop d'exemples historique provenant de la 2e vague du féminisme haissant les personnes trans et les lesbiennes Butch/Fem - un courant qui justement portait l'accent sur le fait que les hommes étaient les ennemis - pour ne pas m'en inquiéter. Qu'on soit clair, je ne traite pas Haramange de transphobe au travers de cette phrase seule, mais toujours est-el que je pense qu'être misandre est une arme à double tranchant; une épée de damoclès si je puis dire. Bien maniée, cela peut être une arme intéressante, mais elle implique par là même toute une reflexion annexe que je pense Haramange n'a pas prise le temps d'entreprendre.
Annexe – Mon ancien avis
(c’était pas vraiment un résumé, mais pas grave)
[Une théorie féministe de la violence, et Moi les hommes je les déteste] sont vraiment opposés. L'un prône la misandrie; quoiqu'il le fasse de manière plutôt nuancé, et l'autre parle de la violence dans tout son caractère systémique. Ce que je veux dire est que dans le livre de Harmange, on comprends que la misandrie ne vient pas de nulle part (non, jure ?!); que cette dernière n'est en rien comparable à la misogynie, soit. J'ai rien contre le fait de se revendiquer misandre dans un tel contexte (en réponse à la miso-) et l'ensemble du livre rappel de nombreux faits que l'on ne peut ignorer. Toujours est-il qu'il me laisse un après-goût assez étrange car bien qu'il mette en valeur le viol des enfants (majoritairement masculin pour < 15ans je crois ? Faut que je retrouve l'étude) (majoritairement par des hommes), on en revient à un tout les hommes sont des cons. Alors, me fait pas dire ce que j'ai pas dite - oui les hommes sont des connards et y a des raisons de s'en méfier de manière systématique - mais c'est, selon moi, oublier tout un pan de l'analyse, c'est se restreindre à une vision binaire « femme victimes/hommes bourreaux » qui est trop facile - c'est se priver d'une analyse un peu plus complexe. Et s'il y a bien une chose que la théorie queer m'a apprise, c'est que les binarismes c'est le mal.
Et c'est là ou je vais un peu rejoindre mon ancien résumé. En faisant une telle séparation cis/trans, elle fait un binarisme un peu iffy. Pour ce qui est du reste, de se priver d'une analyse un peu plus complexe, comme j'ai pu l'évoquée, je pense que j'ai été de mauvaise fois. Peut-être pensais-je au fait que - et sans le savoir parce que j'avais clairement pas lue ça à l'époque - genre et race sont consubstantiels et qu'on ne peux pas analyser l'un sans analyser l'autre, et qu'en conséquence analyser m > f tout en oubliant qu'el existe des m > m ou des f > f est de la mauvaise fois. Cepedant, je dis que cela est de mauvaise fois car Haramange évoque justement bell hooks et le principe d'intersectionnalité et qu'en ce sens, el y ait moyen qu'elle ai préférée (logiquement) se concentrer sur m > f puisque c'est ce qui l'interesse pour son livre.