À en croire certains, les hommes traverseraient une crise de la masculinité dans les sociétés occidentales hyper féminisées. De quoi cette prétendue « crise » est-elle le symptôme ? Dans une enquête éclairée et nécessaire, Francis Dupuis-Déri discute l’origine et la signification politique de cette rhétorique qui a pour effet de susciter la pitié envers les hommes, de justifier les violences masculines contre les femmes et de discréditer le projet de l’égalité entre les sexes.
Auteurice.s:
Francis Dupuis-Déri
Commentaire
Alors, La crise de la masculinité. Autopsie d'un mythe tenace; quoi en dire. En vérité, pas grand chose, parce que tout d'abord j'étais déjà plus ou moins convaincue de la chose; ensuite parce que - à en croire les stat - c'est bien argumenté. Il y est montré comment cette crise - ou plutôt ce que l'on devrait très justement nommer discours de crise - est un fait presque ahistorique ais-je envie de dire. C'est-à-dire, que depuis très longtemps, déjà en grece antique, mais aussi à la renaissance, ce discours existait-il déjà. Outre ces rappels historiques qui dévaluent le propos tenu en ce que quelque chose d'atemporel et aussi élastique que ce discours le rende peu crédible, il y est aussi fait mention de quatres faits principaux qui gouvernent ce discours à notre époque. J'ai nommée :
- échec scolaire des garçons
- suicide
- « le père sacrifié »
- symmétrie de la violence (i.e il y a 50/50)
- (+ la séduction)
Je vais pas faire un état des stats que le livre présente, mais il faut remarquer que c'est bien plus nuancé.e que ça. Par exemple, et concernant les suicides, à la réthorique de « si l'on compare le nombre d'homicides conjugaux et de suicide provoqués par une rupture conjugale, « on ne peux pas dire qu'il y a plus de femmes tuées que d'hommes dans les conflits conjugaux, simplement [que] les méthodes sont un peu différentes […]. Selon Dallaire [...] « [sur le plan de] la violence psycologique, les femmes sont superieures. Les mots font parfois plus mal qu'une gifle », l'auteur entends rapeller que « Les hommes évoquent certes la rupture comme cause de pensées suicidaires dans 6.5% des cas [...], mais ils font plus souvent mention des addictions (8%) et bien plus souvent encore des maladies physiques (14%) et de dépression (17%) [selon l'observatoire national du suicide] ». Donc en grande majorité, livre très intéressant... puis on en arrive à la conclusion.
Déjà, je déplore que Dupuis-Déris fasse cette interprétation de Butler [j’imagine du genre comme un choix au vu de la suite] quand iel-même dans son livre indique, pour une fois, assez clairement que repenser les catégories du genre à la lumière de ce que Nietzsche notait dans La généalogie de la morale: à savoir qu'« il n'y a point d'"être" caché derrière l'acte, [...]; l'"acteur" n'a été qu'"ajouté" à l'acte - l'acte est tout. […]. Nous pourrions en tirer le corrolaire suivant : il n'y a pas d'identité de genre cachée derrière les expressions de genre; cette identité est constituée sur un mode performatif par ces expressions, celles-là même qui sont censées résulter de cette identité. » (P.96). Et je tiens à rappeler qu'on est plus en 90', année de parution du bouquin. C'est pas comme s'il y avait pas eu de nombreux débats sur l'interprétation de Butler, au point qu'iel ait fait.e un second livre (Bodies that matters, traduit par Corps en tout genre en france) pour expliciter son propos. Ce qui me fait me demander s'il a lu le livre - ou tout du moins - à chercher à se renseigner dessus plutôt que d'en tirer des on-dit-que.
Deuxième point qui me renforce dans cette vision de "je sors des trucs que je connais pas" est que l'auteur continue sur sa lancée du queer comme un choix, a dire que l'identité est une affaire de « volonté [...] et désir ». Non ? C'est pas ce que dit la théorie queer ? Je dis pas que des militant.es - les premiant - l'on pas interprété.e comme ça. Mais à mon sens c'était pas le but initial - tout du moins de Butler; dont on oublie souvent la partie agency de son ouvrage. Ce n'est pas un choix libre. De plus, il renforce cette idée selon laquelle les personnes trans seraient des porte-paroles de la subversion de l'identité lorsqu'il dit que « Des personnes [trans] s'inscrivent dans cette tendance [à la subversion] » alors que clairement ce fut un reproche des personnes trans à ce concept de subversion. Je dis pas qu'il faut pas faire de la subversion (même si je suis plus nuancée imo), mais à ne voir que ça, comme le disais Niedergang « le romantisme de la subversion [...] [produit] donc à la fois des effets d'exclusion sensible [...] par exemple, [...] à l'endroit des personnes trans « pas assez subversives », mais également, des processus de capture, par lequels sont fétichisées comme subversives des pratiques qui ne prétendent pas à l'être [...] » (P.55)
Enfin, il confonds selon moi « materialisme » et « radical ». Alors, je dis pas qu'il y a pas des éléments du materialisme qui soient pas radicaux; certes. Mais de là à égaliser les deux, j'ai du mal. D.D met par la dans le même courant, des autrices aussi variées que McKinnon qui pense que sexualité = genre et Delphy qui a théorisée le genre comme rapport binaire et hiérachique. Ou alors, il a une vision différente du mot racidal, peut-être.