Dans ce livre très personnel, la journaliste féministe, lesbienne et militante Alice Coffin cherche à savoir pourquoi, soixante-dix ans après la publication du Deuxième Sexe, et ce malgré toutes les révolutions qui l'ont précédé et suivi, le constat énoncé par Simone de Beauvoir, « le neutre, c'est l'homme », est toujours d'actualité. Elle y évoque son activisme au sein du groupe La Barbe, qui vise à « dénoncer le monopole du pouvoir, du prestige et de l'argent par quelques milliers d'hommes blancs ». Elle y questionne un système médiatique qui peine à se repenser ; interroge la difficulté des personnalités publiques à « sortir du placard » ; revient sur l'importance d'étendre la PMA pour toutes, et sur la déflagration #MeToo. Un ouvrage combattif et joyeux, mais sans concession, qui aide à mieux comprendre ce que veut dire être lesbienne aujourd'hui.

Auteurice.s:

Alice Coffin

  • Lesbien Média
  • Commentaire

    La première chose que je souhaiterais dire concernant ce livre est à propos de ma seconde lecture. Cela va faire deux ans que je me renseigne sur " le genre ", et je remarque une seconde lecture très différente de ce livre, l'un des premiers qu'el m'est été donné·e de lire. Forcement, un reste de colère, ça on y échappera pas. Quand je lis les appels à non-généralisation, les doubles standards criants concernant closer et ses "révelations" de la vie privée ou encore les critiques de la discrimination positive alors même que la discrimination positive, c'est celle des hommes, et pour ne parler que de cela; ouais, j'ai un reste de colère. Mais outre cela, je remarque la richessse de ce livre, ne serait-ce que d'un point de vue académique. Après deux ans de lecture, je me demande comment j'ai pue passer à côté des references à Kosofsky Sedgwick,  Haraway ou encore Lorde, comment j'ai du attendre encore un an pour apprendre le terme de misogynoir et ce, alors même qu'il est écrit noir sur blanc dans ce livre.

    Les deux points que je ressors de ce livre sont avant tout une discussion général sur la neutralité et sur le coming-out.

    Une très grosse partie de ce livre critique la prétendue neutralité des groupes dominants, particulièrement dans le domaine journalistique qui est celui d'Alice Coffin. Cette fameuse neutralité au nom de laquelle on ne peut pas écrire sur nos véçus ou les évenements qui nous concernent, comme si cela allait introduire un biais de neutralité, comme si ces même personnes n'en étaient eux-même pas exempts. Une très bonne analyse de Laura Flanders soit dit en passant qui fait le lien (implicte) entre blanchité et capitalisme. Elle ecrit,

    “ C'est un tour de passe-passe économique. Si vous affirmez que l'objectivité est possible, alors vous justifiez la disparition de milliers de titres. Puisqu'il n'y a qu'une vérité, celle de l'objectivité, alors plus besoin de diversité. ” (P.67)

    Je parle de blanchité parce que cette objectivité dont elle parle, c'est la même qui fait dire à Ketsia Mutombo quelques pages plus haut que « [d]ans les systèmes de valeurs de la pensée européene, il y a une diabolisation de l'émotion. Elle est opposée au cartésianisme. [C'est ...] une arme sexiste et raciste » (P.61)

    On a aussi tout une analyse très intéressante du coming-out en france. Car outre la propension à ne même pas en venir à traduire le terme, Coffin énonce que la crainte de sortir du placard est avant ou une crainte de communautarisme, nombres de personnalités ne voulant pas s'afficher par peur de se faire renvoyer au particulier; et celleux le faisant d'ajouter pressement qu'els " ne parlent pas pour la communauté " ou autres phrases de ce style. Je parlais de Closer plus haut et des doubles standards. El est affligeant de constater que lorsque le magasin révèle (le terme est important) l'orientation sexuelle d'une minorité, tout le monde crie et martèle un attentat à la vie privée. Mais lorsqu'el s'agit d'une personnalité hétérosexuelle ? Rien (et on critique alors très justement l'attentat à la vie privée tout court). Les médias créés le placard, ils en sont parti prenante; et ces "révélations" à la Closer, non loin de le détruire le renforce. Car qu'est-ce qu'ils disent lorsqu'ils parlent de " révélation " si ce n'est le fait qu'el s'agirait là de quelque chose de privé, de secret. Un secret d'ailleurs bien gardé par ces même médias qui n'en ratent pas une pour effacer nos véçus. On la vue avec la neutralité, et on le revoit avec les euphémismes et ce, quand bien même la personnalité considérée est out.

    Je n'ai pas grand chose à dire sur ce livre tant et si bien que je suis d'accord avec ce qu'il énonce. J'ai p'être un peu de mal avec cette vision sous-jacente de l'homme c'est l'ennemi - très compréhensible soit-dit en passant - mais d'un autre côté Coffin fait selon moi preuve dans son livre d'une reflexion plus poussée, cette même reflexion que je trouvais absente chez Haramange et que je déplorais. Et ce, ne serait-ce par le fait qu'elle invoque l'intersectionnalité de manière bien plus concrete. Contrairement à des livres que j'ai pu lire par le passé comme Libérées ! Le combat féministe se gagne devant le panier de linge sale (Titou Lecoq) et qui invoquent l'intersectionnalité pour en rappeler la définition et, de mon point de vue, faire genre [1]; son livre regorge de mentions à des millitantes anti-racistes, a des personnes avec qui elle à discutée, et à des analyses liés aux luttes des personnes trans (ne serait-ce parce qu'elle vit aussi du mégenrage). Je la connais pas, et puis personne n'est parfait·e, mais rien que ça, ça me fait·e me dire qu'elle à une meilleure take.

    [1] On rappel que la seule mention de Lecoq à un exemple d'intersectionnalité est le cas " minceur / blanchité " (j'imagine en opposition à grosse ?). C'est un exemple d'intersection (et encore parce que je me souviens pas qu'el ait évoqué·e la race), certes, mais on va dire que y a sûrement bien plus pertinent comme premier, voir seul, exemple à donner.