L'Occident n'a cessé depuis les origines de s'interroger sur la différence des sexes. Mais parle-t-on de l'homme et de la femme que l'on n'a encore rien dit : se réfère-t-on au genre, définition culturelle par des qualités morales, affectives, sociales, ou au sexe, définition par des spécificités anatomiques ? Jamais, en effet, les deux notions ne se recouvrirent, rappelle Thomas Laqueur dans cet ouvrage qui demeure une référence majeure. Dès l'Antiquité, Aristote, par la définition de l'ordre des êtres, et Galien, par la définition du corpus anatomique, fondent le modèle du sexe unique, qui sera dominant jusqu'au XVIIIe siècle, et dans lequel le genre définit le sexe. Au XVIIIe siècle émerge l'autre modèle de la différence sexuelle, le modèle des deux sexes, dans lequel, au contraire du premier, le sexe définit le genre : parce que, au niveau de l'anatomie comme de la physiologie, femmes et hommes sont incommensurablement différents, les genres définissent dès lors qualités, vertus et rôles selon des racines biologiques. Ces deux modèles coexistent dans le temps dès le XVIe siècle des auteurs posent l'irréductible différence anatomique, alors qu'au XXe siècle encore Freud pense la sexualité selon le modèle du sexe unique car leur prégnance sur les esprits, si elle est liée à des évolutions générales, économiques, culturelles, sociales, ne peut en aucun cas être strictement expliquée par celles-ci ; et moins encore par les progrès de la connaissance anatomique, qui se moulent le plus souvent dans les représentations dictées par chacun de ces modèles.

Auteurice.s:

Thomas Laqueur

  • Sexe Historique Postmodernisme
  • Commentaire

    Je vais commencer ce résumé (et pas critique parce que je n'ai rien à critiquer, dans le sens où c'est de l'histoire et puis je m'y connais pas assez pour pouvoir en dire quoique ce soit) par un détour, une citation que j'ai lue récemment dans une autre thèse. Celle de Markus Montola qui énonce que « la notion de construction est une théorie de connaissance affirmant que, bien que l’existence d’une réalité matérielle ne dépende pas d’observateurs et d’observatrices ayant une conscience, toutes les significations sont construites socialement. »

    Et je trouve que cette phrase résume parfaitement l'idée que Laqueur souhaite transmettre, et que l'on voit très clairement exprimée à la fin de son ouvrage; à savoir que « Les deux sexes ne sont pas une conséquence naturelle et nécessaire de la différence corporelle. Le sexe unique non plus, au deumeurant. La manière dont on a pu imaginer dans le passé la différence sexuelle ne devait pratiquement rien à ce que l'on savait de telle ou telle bribe d'anatomie [...] mais dérivait plutôt des exigences rhétoriques de l'heure. » (P.396). Et effectivement, il ne dit pas autre chose lorsqu'il énonce en début de livre que « [Son propos n'est pas de nier la réalité du sexe ni du dimorphisme sexuel en tant que processus évolutif. Mais j'entends montrer [...] que presque tout ce que l'on peut vouloir dire sur le sexe [...] contient déjà une affirmation sur le genre. » (P.43)

    Donc, si je comprends bien, il ne s'agit pas tant de nier une certaine configuration anatomique prévalente; mais bien plutôt d'insiter sur le fait que toute description séparatrice, toute " signification ", sont elles-même contingentes, variables. Et pour argumenter de cela, de nombreux exemples historiques. On pourra citer la grèce antique et son modèle de l'inversion du vagin compris comme un pénis interieur, et plus généralement, la femme comme une vision moindre de l'homme sur l'axe de la masculinité; mais aussi la vision du moyen-age ou le sexe importait peu et ou la concordance entre rôle social et genre était bien plus importante à l'instar de l'histoir de Marin le Marcis où « le soucis des juges ne portait, apparement, non pas sur le sexe sous-jacent, mais sur le genre : quels signes de rang, quels habits, quelles postures ». On pourrait aussi parler du rôle de l'ovaire, lequel était avant tout sujet à des préjugés plus qu'à un veritable savoir scientifique; ou encore le fait que les représentations scientifiques d'organes étaient soumis à des idéaux esthétiques qui pronait une certaine configuration, la « fabrique du squelette féminin » étant « un exercice d'esthétique profondément marqué par la culture » et la représentation de ce dernier, de comment il dévait être, « revendiqu[ait] un status canonique, qui prétendent représenter l'oeil humain ou le squellette de la femme » et qui est « plus directement impliqu[é] dans la culture qui [le] produit » (vers les P.268)

    En fin de compte, on en viendrait à la création de deux sexes incommensurablement distincts, ontologiquement différents. Ce que Rousseau dirait en ces termes : « En tout ce qui ne tient pas au sexe, la femme est l'homme [...] En tout ce qui tient au sexe, la femme et l'homme ont partout des rapports et partout des différences ». Il y a eu selon lui différents modèles de l'anatomie qui ont partagés les siècles à savoir celui de la "chair unique", le modèle unisexe, et celui de la binarité, le modèle des deux sexes.

    Alors, semble-t-il qu'on peut le critiquer sur sa vision du modèle unisexe comme étant hégémonique en grèce antique (j'irais look à un moment). Mais je trouve néanmoins qu'il apporte de bons points lorsqu'il parle du squelette par exemple; point qui est encore visible aujourd'hui concernant les personnes trans. On s'evertue à dire que le squelette feminin et masculin sont fondamentalement différents, qu'il existe une différence deterministe et intrinsèque - encore une fois, ontologique - entre les deux sexes, alors que les representations de ce même squelette dans la culture ont joués sur la façon dont on le conçoit. Et il est même étonnant que nombres de personnes pensent encore ainsi quand on sait, semble-t-il, que plus que le squelette, c'est la masse graisseuse qui joue sur la corpulence.

    Donc ouais, livre intéressant - et j'ai  barely scratched the surface here - mais bon, c'est une thèse (I think ?) et j'ai clairement pas le level en histoire des science pour ne serait-ce que prétendre à critiquer quoique ce soit. Toujours est-il que, si on s'en tient à ce qu'il dit, ça me parait pas déc'. Et quand bien même le modèle du sexe unique ne fut pas aussi important qu'il le théorise, toujours est-il que, me semble-t-il, ce modèle à partagé les pensée avec un modèle bisexe, ce qui ne remet pas en question le fonds de sa thèse.