Depuis les années 1960, l'hôpital est devenu le lieu de l'accouchement. Disparues les terreurs d'antan et les souffrances d'un autre âge : la péridurale y est aujourd'hui reine pour supprimer les douleurs. Pourtant, dès que l'on questionne les femmes sur leur expérience, nombreuses sont celles qui font part de vexations, d'intimidations, de coercitions, voire de brutalités et de violences. Ce qui devait être un heureux événement se transforme en cauchemar sous la pression des médecins qui suivent les protocoles hospitaliers. "On m'a volé mon accouchement." Le refus d'entendre les femmes et la domination que les soignants exercent sur elles est à l'origine de traumatismes physiques et psychiques considérables. Un grand nombre des dépressions post-partum ou des syndromes de stress post-traumatique trouvent probablement là leur cause. Restée longtemps cachée, cette violence commence à apparaître au grand jour, alors que la parole des femmes se libère enfin. L'obstétrique est profondément misogyne. Elle considère les femmes comme faibles, malades, dangereuses, dont le corps serait inadapté pour mettre les enfants au monde. L'accouchement est ainsi resté l'un des derniers bastions de la domination masculine. Rendre les femmes maîtresses de leur accouchement exige, ni plus ni moins, une révolution. En analysant les pratiques autour de l'accouchement à travers la littérature scientifique, les recommandations des instances de santé et les travaux d'historiens et d'anthropologue, Marie-Hélène Lahaye signe un document majeur, livre-clé dans la réorientation des politiques à mener autour des droits des femmes.

Auteurice.s:

Marie-Hélène Lahaye

  • Féminisme Médicine VSS
  • Commentaire

    Alors, dans un premier temps, je vais faire une rapide présentation des sources. Depuis Frederici, c'est quelque chose que je pense je vais m'atteler à faire davantage. Ce n'est pas à dire que je vais regarder les sources en détail - chiant et long - mais au moins tenter d'avoir un aperçu, y faire plus attention. En ce qui concerne Accouchement, les femmes meritent mieux, sur les quelques articles que j'ai prélevée et sur la seule verification de chiffres que j'ai faite, ça semble aller. Selon Scimago les articles viennent de journeaux correctes.

    Concernant le livre en lui-même. Je déplore un vocabulaire qui peut parfois aller dans la métaphorisation – par exemple: « L'arrivé de mon bébé s'est acompagnée d'un deferlement d'émotions, d'une extase ultime, d'une propulsion vers une autre dimension (P.19-20) » - ce qui, moi, personellement, me dérange. Mais outre cet avis plutôt subjectif, je trouve que à quelques ocassions dans le livre, Lahaye manque de sources. Par exemple, lorsqu'elle énonce que « Traditionellement, l'accouchement était une affaire de femmes. Un rituel spécifique était destiné aux maris […] » (P.235). On se serait attendu à une citation d'étude antropologique ou similaire, mais non (EDIT : Cf. La matrice de la race de Dorlin qui en parle, mais ça empêche pas ma critique). Heureusement, ce genre de manque n'est pas suffisant, selon moi, pour critiquer l'ensemble du livre en tant que tel. Effectivement, je suis plus wary en ce qui concerne les passages dédiés à la chasse aux sorcières et Frederici, mais c'est un point sur lequel je reviendrais plus tard.

    Dans l'ensemble, un livre très correct qui s'appuie sur des études et des organisations mondiales (en plus de témoignages), pour montrer en quoi les violences obstetriques existent. Violences qui sont définies par l'autrice (juriste) comme « tout comportement, acte, omission ou abstention commis par le personnel médical de santé, qui n'est pas justifié médicalement et/ou qui est effectué sans le consentement libre et éclairé de la femme enceinte ou de la parturiente » (P.187).

    J'avais déjà eu vent rapidement des conditions horribles de nombres d'accouchements en hopitaux et du problème de la péridurale, mais ce livre a enfoncé le clou. Des nombreux exemples que j'ai pue lire, on peut citer par exemple (TW : viol) L'affaire des « carnets de Lyon » [1] de 2015 où il fut révelé que des étudiants ont effectués des touchés vaginaux a des patientes endormis sans leur consentment préalable. Ou encore qu'en l'état actuel des choses, une sage-femme, si elle veut aider une personne à accoucher à domicile, doit verser une somme de 25k euros en assurance préalable.

    Ce livre à réaffirmé l'intrication du capitalisme et du Patriarcat dans nos sociétés et n'en est qu'une enième preuve. Alors que la pratique de l'épisiotomie ou encore de la femme comme devant se livrer à un strict processus d'accouchement (soit à une ouverture du col de l'ordre de 1cm/h) parmi tant d'autres exemples, affirme avec force le caractère capitaliste de l'hopital cherchant à aller au maximum de productivité (pour un evenement qui y est contraire); d'autres pratiques tels que le point du mari (cité dans une note) ou encore les touchés vaginaux inutiles, consistant en la vérification que la personne suit bien le processus de 1cm/h, voir même l'insistance en la position missionaire ne font que renforcer ici le caractère patriarcal de la chose.

    Dans ce contexte, je me souviens du livre de Walby, Theorizing Patriarcy, dans lequel elle cherche à montrer que l'on est passé.e d'un patriarcat privé à public. Comme s'il en fallait une preuve, ce livre est limpide. Que dire si ce n'est qu'il en est une répresentation parfaite, de l'appropriation (public) du corps des femmes par les hommes. On notera tout de même un passage très interessant sur le rôle du mari dans l'accouchement. En effet, celui-ci est instrumentalisé dans ce processus soit en tant qu'objet passif permettant l'aval de la péridural (regardant les douleurs se produire, il sera plus enclin à), ou carrément actif en ce qu'il va chercher à rassurer la femme, ou essayer de lui faire changer d'avis. Ce passage est éclairant, et je le trouve très utile en ce qu'il nous rappel que tout le monde à y perdre.

    En ce qui concerne Frederici et la chasse aux sorcières, bien que la validité de l'attaque contre les sages-femmes ait été l'objet de critique, comme je crois l'avoir dit dans ma critique du livre, cela aura eu l'effet de reporter attention sur le phénomène, au moins du point de vue profane (du côté des historien.nes, la recherche à pas arrêter contrairement à ce que dit Frederici, semble-t-il). De plus, il est assez évident que, même si la validité d'une telle affirmation peut être remise en cause, toujours est-il que l'on observe bien une attaque à l'heure actuelle. En effet, il a bien fallu quelque chose pour que l'on oublie totalement des savoirs d'accouchements naturels et que l'on se dirige vers une optique " hopital exclusif '. Il a bien fallu quelque chose pour que l'on se décide à octroyer une sorte de taxe de 25k (en bélgique elle est de 1k) à des sages femmes uniquement dans le cas de l'accouchement à domicile. Alors oui, il n'y a peut-être pas eu d'attaque ciblée au moyen-âge, mais toujours est-il que le mécanisme partriarcal de contrôle du corps des femmes est bien présent à l'heure actuel. Dans un tel contexte, il peut être effectivement pertinent de se demander si cette chasse n'a pas faite partie d'une attaque sur le corps des femmes, et si non, quels ont été les phénomènes qui ont ancré ce processus.

    [1] Mon appelation.